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“Tête d’âne”, par Jean Bernard (1775-1883). Dessin au crayon sur papier, 1821. © Rijksmuseum/rawpixel

Bestiaire

Petite philosophie de l’âne

Octave Larmagnac-Matheron publié le 29 mars 2024 10 min

C’était il y a 7 000 ans, quelque part en Afrique : l’être humain, pour la première fois, domestiquait l’âne – précieux compagnon d’un mode de vie nomade. C’est ce que révèle une étude génétique récente. Contrairement au chien ou au cheval, apprivoisés parallèlement au sein de différentes sociétés, le baudet l’a été une seule fois. Depuis lors, il suit l’humanité dans ses pérégrinations, au gré desquelles sa figure accumule les significations les plus diverses.


Sage ou stupide, l’âne ?

Accompagnant l’homme depuis des millénaires, l’âne s’est chargé, non seulement de baluchons, mais de significations souvent paradoxales. Avant d’évoquer négativement l’idiotie des caractères par trop têtus (« bête comme un âne », dit-on), l’Equus asinus convoque des images positives d’endurance face à l’adversité du monde. Dans l’Iliade, Homère compare Ajax à l’animal en ces termes : « De même un âne têtu entre dans un champ, malgré les efforts des enfants qui brisent leurs bâtons sur son dos. Il continue à paître la moisson, sans se soucier des faibles coups qui l’atteignent, et se retire à grand-peine quand il est rassasié. » L’âne est également, dans la tradition chrétienne, un symbole d’humilité. Il est présent lors de la naissance du Jésus, sert de monture à Marie dans sa fuite en Égypte et, finalement, porte le Christ lors de son entrée à Jérusalem : « Ton roi est humble, il est monté sur un âne, sur un ânon, le petit d’une ânesse » (Zacharie, 9,9).

Cette imagerie est en partie reprise dans L’Âne d’or ou les Métamorphoses de l’auteur latin Apulée (IIe siècle). Le héros, Lucius, porté par sa curiosité, se pique de magie et se retrouve accidentellement transformé en âne. Lui qui voulait, par la connaissance occulte, s’élever au-dessus du commun des mortels, doit passer de maître en maître et se trouve rabaissé au rang de serviteur. Depuis cette position, il assiste aux drames de l’humaine condition. Si la magie lui ouvre une vérité, c’est moins une transcendance sublime que la misère amère des êtres humains. En bout de course, Lucius se change finalement à nouveau en homme. Mais il note : « Moi-même je conserve à ma personne d’âne un souvenir reconnaissant, caché sous cette enveloppe, éprouvé par des fortunes diverses, je lui ai dû sinon plus de sagesse, du moins plus de savoir. » L’âne est associé à une forme d’intelligence, à un sens des réalités terrestres plus fondamental, plus profond que les divagations métaphysiques. Avant de devenir un symbole de stupidité sous la Troisième République, le bonnet d’âne servira d’ailleurs au Moyen Âge à insuffler symboliquement aux jeunes clercs un peu de la sagesse de l’animal.

L’âne de Buridan

Si la métamorphose en âne peut-être in fine vécue, chez Apulée, comme une expérience formatrice, elle n’en demeure pas moins aussi une forme de punition. La vie servile et bornée de l’âne qui n’en fait qu’à sa tête et suit seulement son bon plaisir, n’est pas un idéal. L’homme est-il pourtant si différent de lui ? C’est la question que pose le célèbre paradoxe de l’âne de Buridan. Le scolastique médiéval Jean de Buridan n’a pourtant lui-même jamais parlé d’âne. Il reprend, à travers la figure d’un chien, une expérience de pensée d’Aristote : « Celui qui, affligé d’une faim et d’une soif très vives, mais également intenses, se trouve à égale distance des aliments et des boissons : lui aussi demeurera nécessairement immobile ! » (Du Ciel) Placée entre gamelle de nourriture et une gamelle d’eau, la bête également affamée et assoiffée semble condamnée à ne pas choisir – et à mourir sottement. C’est la conséquence qu’il faut tirer d’une vision strictement déterministe. Buridan, pour sa part, concède à l’homme une « liberté d’indifférence » qui lui permettra, contrairement à l’animal, de se tirer de cet équilibre insoluble et fatal.

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