Pendant que j’y pense / novembre 2018

Catherine Portevin publié le 1 min

« Si vous vous endormez sur mon livre, je serai ravi. » Il faut une certaine dose de provocation pour introduire ainsi un pavé intitulé Pourquoi nous dormons (La Découverte). Ou bien n’est-ce qu’un brin de coquetterie, car cet ouvrage de vulgarisation scientifique n’a rien de soporifique. À moins qu’il ne s’agisse de poésie insurrectionnelle comme celle que cherchait naguère une paire de situationnistes dans des congrès ordinaires de « banalyse » avec la hantise qu’il s’y passe quelque chose ! Mais le neurophysiologiste Matthew Walker n’a rien du situ, même s’il défend nos oreillers contre le trop de lumière, d’agitation et d’écrans. À quoi sert donc cette bizarrerie de l’évolution qui nous empêche huit heures par jour de boire, de manger, de nous reproduire, de nous défendre… Bref, de tout ce qui permet au vivant de persévérer ? On a découvert, depuis une vingtaine d’années, qu’il sert à tout : santé du corps et de l’esprit, mémoire et capacités d’apprendre aiguisées, émotions ajustées, lucidité et créativité augmentées, autrement dit tout ce que les Anciens préconisaient pour la vie bonne. Mais pas plus Socrate qu’Épicure ne trouvaient utile de s’étendre sur le repos, vu comme besoin naturel à satisfaire avec modération. La philosophie, se levant au crépuscule comme la chouette de Minerve, est depuis toujours un art de la vigilance. En nous ouvrant les yeux sur la nécessité de les fermer durant le tiers de notre existence, Pourquoi nous dormons serait-il alors, à son corps défendant, un livre antiphilosophique ?

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Pourquoi lui, pourquoi elle ?
Comment expliquer nos choix amoureux ? Faut-il se fier au proverbe « qui se ressemble, s'assemble », ou doit-on estimer à l'inverse que « les opposés s'attirent » ? La sociologie de Bourdieu et la philosophie de Jankélévitch nous éclairent.
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