“Noopouvoir”
Le capitalisme sait, depuis des décennies, jouer avec les désirs pour alimenter son expansion : exploiter des fantasmes les plus intimes, réveiller les pulsions enfouies ou même créer de toutes pièces des rêves dont il peut tirer profit. Cette grande entreprise connaît aujourd’hui un tournant, avec l’infiltration généralisée des interfaces numériques : il ne s’agit plus seulement de susciter ou même de fabriquer des désirs isolés, mais de remodeler à des fins marchandes la forme même de l’esprit, instance d’unification du psychisme. C’est la thèse développée, à travers la notion de « noopouvoir » (du grec nóos, esprit), par le collectif Balise ouvrante dans un ouvrage qui paraît en février aux éditions de La Grange batelière, Conjurations. Le noopouvoir « parvient à occuper des aspects de l’existence qui restaient hors de portée des pouvoirs passés ». Il « accomplit ce dont l’économie de marché a toujours rêvé : faire concorder le mouvement des êtres et de leurs pensées avec celui des marchandises ». Le concept n’est pas entièrement nouveau. Il est déjà employé par Bernard Stiegler, notamment dans Le Sujet digital (2015). Mais le philosophe l’appréhende en même temps sous son versant positif. Le noopouvoir est, à ses yeux, un pouvoir que nous pouvons nous approprier pour atteindre le « mode plénier de l’individuation », pour réaliser notre existence comme personne. Il peut et doit, pour Stiegler, être soutenu par une « noopolitique […] qui se consacrerait à la lutte contre le neuropouvoir », contre l’instrumentalisation de la compréhension scientifique de plus en plus poussée de l’esprit par le « neuromarketing » et la « neuroéconomie ». Contre le formatage, la noopolitique se présenterait comme « art politique de la polyculture des sortes de jardins que sont les cerveaux ».
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