Mémorandum
Le Centre Pompidou à Paris consacre, jusqu’au 16 mars, une grande exposition, Faire son temps, au travail d’artiste-archiviste de Christian Boltanski. L'ambition de tout conserver est-elle à même de nous préserver du pire ?
Objets personnels, souvenirs d’enfance, photos de famille… Au Centre Pompidou, une exposition retrace la vie d’un obsessionnel de la mémoire : Christian Boltanski, connu pour ses empilements précaires de boîtes en fer, sur lesquelles sont collés des portraits d’inconnus, Les Suisses morts (photo). Cette œuvre occupe un large espace du dernier étage du musée, ouvert sur une impressionnante vue de Paris. Du vœu de tout conserver, Christian Boltanski a fait un sacerdoce, tentant de conjurer l’impossible en témoignant de ce que Giorgio Agamben appelle « l’intémoignable ». Le philosophe l’écrit dans Auschwitz. L’archive et le témoin (1998 ; trad. fr. Rivages, 2003), en pensant aux victimes des camps : « Les engloutis n’ont rien à dire, aucune instruction ou mémoire à transmettre. Ils n’ont ni “histoire”, ni “visage”, ni, à plus forte raison, “pensée”. Qui se charge de témoigner pour eux sait qu’il devra témoigner de l’impossibilité de témoigner. » Né en 1944, l’artiste a fondé son œuvre sur ce paradoxe. Il a intitulé son exposition « Faire son temps », parce qu’il entend convoquer ces mémoires disparues, depuis la Shoah. Mais son travail d’archive, parfois hermétique, porte non sur le passé, non sur ce qui a fait son temps, mais sur ce qui fait notre temps, selon le sens qu’Agamben donne à l’archive. Elle pour lui est la « masse des choses dites » dans une culture de façon « non sémantique », un non-dit entre « la mémoire compulsive de la tradition » et « la désinvolture excessive de l’oubli ». Faire son archéologie constitue « la seule voie d’accès au présent » pour Agamben. Une voie royale pour Boltanski.
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