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Matériel de campagne de l’Union populaire (France insoumise) pour les élections législatives. © L’Union populaire

Objectif législatives

“Mélenchon Premier ministre” : autorité du Parlement… ou du chef ?

Antony Chanthanakone publié le 28 avril 2022 4 min

Jean-Luc Mélenchon le martèle : il entend devenir le Premier ministre d’Emmanuel Macron et lui « imposer une cohabitation ». Fort de son résultat au premier tour de l’élection présidentielle (22%), il souhaite disposer d’une majorité à l’Assemblée nationale pour que le président soit contraint de le nommer Premier ministre. D’après un récent sondage, 56% des Français espèrent une cohabitation sous le second mandat d’Emmanuel Macron, ce qui valide au moins sur le papier la stratégie du candidat déchu.

Or appeler à voter non pour des députés, mais pour un Premier ministre, est-il vraiment conforme à nos institutions ? Comment se revendiquer d’une autorité charismatique et d’un modèle parlementaire fort ? On trouve cette tension chez Max Weber, tel que relu par Raymond Aron. Analyse.

 

La Ve République ou l’élection d’un “chef charismatique”

En 1919, Max Weber juge la jeune République de Weimar impuissante. Il faut selon lui instaurer une « démocratie plébiscitaire » afin de redonner une légitimité, fondée sur le charisme, à la fonction exécutive. Le charisme est en effet l’un des trois types d’autorité que décrit Max Weber dans son œuvre, notamment dans Économie et Société (1921) – avec l’autorité traditionnelle et l’autorité rationnelle-légale. Il préconise ainsi l’élection du président de la République au suffrage universel direct : « Seul un président du Reich s’appuyant sur des millions de voix peut avoir l’autorité qui lui permette d’engager la socialisation, pour laquelle rien ne pourra se faire à coup d’articles de loi. »

Certains n’ont pas manqué de faire le rapprochement entre la Ve République et la philosophie politique de Max Weber. Pour Raymond Aron, grand lecteur de Weber, la Constitution de 1958 est « une démocratie plébiscitaire » au sens de Weber : « Le chef charismatique, élu au suffrage universel, qui prend seul les grandes décisions, responsable devant sa conscience ou devant l’histoire, tel est le chef “démocratique” qu’avait imaginé Max Weber […] tel que le président de la République française l’incarne depuis 1959. » (Raymond Aron, Les Étapes de la pensée sociologique, Gallimard, 1967)

 

Un “régime semi-présidentiel” avec un parlement

Si Max Weber défend l’établissement d’un « chef charismatique » à la tête de l’État, il reste attaché au parlementarisme. Dans la préface du livre Le Savant et le Politique rassemblant des textes de conférences de Max Weber, Aron note que Weber « était obsédé par son hostilité à l’égard de l’empereur, auquel il imputait une responsabilité majeure dans la catastrophe allemande [de la Première Guerre mondiale]. Le transfert au Parlement de responsabilités effectives offrirait aux personnalités énergiques, combatives, animées par la volonté de puissance et de lutte, une meilleure chance d’accéder au pouvoir. » Max Weber est par ailleurs attaché à la nécessité d’une constitution, d’un État de droit et à la valeur des libertés personnelles.

Là encore, on retrouve une compatibilité avec le modèle de la Ve République, qui reste un régime parlementaire, ou du moins où l’exécutif et le législatif se contrebalancent. Le politiste Maurice Duverger (1917-2014) parle d’un « régime semi-présidentiel » traduisant bien l’équilibre tout wébérien de la Constitution de 1958 : le Premier ministre reste responsable devant l’Assemblée nationale qui lui accorde ou non sa confiance.

 

La cohabitation : charisme contre charisme ?

Jean-Luc Mélenchon joue donc sur cette ambivalence. Si le terme « élire le Premier ministre », employé par la France insoumise, ne correspond pas à la réalité des institutions – puisque le ministre est nommé par le président de la République –, ce dernier a vocation à nommer à la tête du gouvernement une personnalité qui puisse avoir l’appui de la majorité à l’Assemblée nationale, comme le précise le Conseil constitutionnel. Si le 19 juin, l’Assemblée nationale devenait majoritairement de gauche, avec par exemple une coalition entre la FI, le PCF, EELV et le PS, alors Emmanuel Macron se devrait de nommer un Premier ministre issu de cette majorité. Rien ne l’obligerait cependant à choisir spécifiquement Jean-Luc Mélenchon : le choix devrait aboutir après des négociations.

Weber avait déjà perçu un tel conflit entre pouvoir exécutif et législatif, mais considérait néanmoins utile d’avoir des personnalités politiques fortes au sein d’un parlement : « En raison du trait “césariste” de la démocratie de masse, les partis [au Parlement] sont contraints de se plier aux véritables tempéraments et aux dons politiques des chefs, dès que ceux-ci se montrent capables de gagner la confiance des masses. » Le risque d’instabilité politique reste néanmoins important, dans ce type de configuration. La réforme du quinquennat, qui a notamment placé les élections législatives dans la foulée de l’élection présidentielle, a permis d’éviter cette instabilité, mais amoindri le Parlement. Raison pour laquelle, entre autres, la France insoumise entend passer à un régime parlementaire avec sa VIe République.

 

Cette ambition n’est toutefois pas sans contradiction, et la campagne de communication de Jean-Luc Mélenchon sur le « troisième tour » la révèle au grand jour. On peut pointer, dans la vision politique de la France insoumise, une tension extrême entre une volonté de démocratiser la vie politique française (l’instauration de la proportionnelle à l’Assemblée s’inscrit dans cette logique) et le besoin de recourir au charisme de son chef, parfois écrasant, ce qui avait été théorisé en 2017 comme un « populisme de gauche ». Pour faire bloc contre « la monarchie républicaine » incarnée par Macron, Mélenchon ne propose-t-il pas finalement un autre type de monarchie, parlementaire peut-être, mais tout autant personnalisée ?

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