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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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© Nariman Mosharrafa/Unsplash

Environnement

Magique, prosaïque et polluant : une philosophie du plastique

Octave Larmagnac-Matheron publié le 08 décembre 2021 5 min

Le plastique a façonné notre monde contemporain… mais il est aujourd’hui en train de l’étouffer. Les déchets plastiques, extrêmement pérennes et résistants, s’accumulent aux quatre coins du monde, en dépit de politiques timides de réduction. Un problème sous l’œil de trois philosophes : Roland Barthes, Catherine Malabou et François Dagognet.

Roland Barthes : le texte fondateur 

C’est à Barthes que l’on doit un petit texte passé à la postérité pour avoir mis en lumière les traits décisifs de ce matériau éminemment moderne qu’est le plastique : infiniment malléable, le plastique est tout et rien à la fois. Tout car, plus riche de la nature elle-même, il en vient à se substituer à elle. Rien, parce qu’il est dépourvu de toute substance déterminée.

“Plus qu’une substance, le plastique est l’idée même de sa transformation infinie, il est, comme son nom vulgaire l’indique, l’ubiquité rendue visible ; et c’est d’ailleurs en cela qu’il est une matière miraculeuse : le miracle est toujours une conversion brusque de la nature. Le plastique reste tout imprégné de cet étonnement : il est moins objet que trace d’un mouvement.

Et comme ce mouvement est ici à peu près infini, transformant les cristaux originels en une multitude d’objets de plus en plus surprenants, le plastique est en somme un spectacle à déchiffrer : celui-là même de ses aboutissements. […]

Il peut former aussi bien des seaux que des bijoux. D’où un étonnement perpétuel, le songe de l’homme devant les proliférations de la matière, devant les liaisons qu’il surprend entre le singulier de l’origine et le pluriel des effets. Cet étonnement est d’ailleurs heureux, puisqu’à l’étendue des transformations, l’homme mesure sa puissance, et que l’itinéraire même du plastique lui donne l’euphorie d’un glissement prestigieux le long de la Nature. Mais la rançon de cette réussite, c’est que le plastique, sublimé comme mouvement, n’existe presque pas comme substance. Sa constitution est négative : ni dur ni profond, il doit se contenter d’une qualité substantielle neutre en dépit de ses avantages utilitaires. […]

C’est la première matière magique qui consente au prosaïsme ; mais c’est précisément parce que ce prosaïsme lui est une raison triomphante d’exister : pour la première fois, l’artifice vise au commun, non au rare. Et du même coup, la fonction ancestrale de la nature est modifiée : elle n’est plus l’Idée, la pure Substance à retrouver ou à imiter ; une matière artificielle, plus féconde que tous les gisements du monde, va la remplacer, commander l’invention même des formes. Un objet luxueux tient toujours à la terre, rappelle toujours d’une façon précieuse son origine minérale ou animale, le thème naturel dont il n’est qu’une actualité. Le plastique est tout entier englouti dans son usage : à la limite, on inventera des objets pour le plaisir d’en user. La hiérarchie des substances est abolie, une seule les remplace toutes : le monde entier peut être plastifié, et la vie elle-même, puisque, paraît-il, on commence à fabriquer des aortes en plastique”

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