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© Eric Hoube (@zericiphone)

Dossier/Faut-il toujours viser l’utile ?

Les grands dilemmes de l’utilitarisme

Catherine Audard, propos recueillis par Michel Eltchaninoff publié le 29 avril 2021 9 min

Plaisir ou bonheur ? Bien-être individuel ou collectif ? Peut-on concilier préoccupations éthiques et recherche du profit ? Depuis Jeremy Bentham, le fondateur de ce courant au XVIIIe siècle, l’utilitarisme est traversé par des questions toujours très actuelles qu’éclaire pour nous la philosophe Catherine Audard.

 

1. Faut-il rechercher le plaisir des sens ou aspirer à des formes de satisfaction plus élevées ?

« Pour Jeremy Bentham [1748-1832], le fondateur de l’utilitarisme, le plaisir que l’on retire de la lecture d’un poème n’a pas plus de valeur que celui de manger un bon repas. C’est chez lui une manière de provoquer la morale traditionnelle et les conventions de son époque. Rien ne sert d’idéaliser la nature humaine ! Mais son objectif, s’inspirant des épicuriens de l’Antiquité et des philosophes matérialistes français du XVIIIe siècle, est de rappeler un constat essentiel, que les êtres humains sont mus par deux impulsions fondamentales : rechercher le plaisir et fuir la souffrance. Une action moralement bonne sera donc celle qui suit notre nature et vise à augmenter le plaisir, le bien, et à diminuer la souffrance, le mal. L’utilitarisme se veut une philosophie “scientifique”, fondée sur l’observation de la réalité. Que le sentiment de satisfaction soit produit par la nourriture, le sexe ou un poème, cela ne change pas grand-chose. Non seulement tous les plaisirs se valent, mais tous les êtres qui en sont capables se valent, et leurs satisfactions individuelles doivent compter également. Bentham, par exemple, montre par un calcul rationnel des plaisirs et des peines, chacun comptant également, qu’il faut rejeter la peine de mort comme inefficace, car les souffrances et les tortures infligées à un criminel ne peuvent pas maximiser la “félicité publique” et faire du bien à la société. C’est dans cette même optique que Bentham a voulu réformer les prisons. En 1791, il propose à l’Assemblée nationale française son fameux Panopticon, modèle d’une prison utile et efficace, facilitant le bien-être et la surveillance des détenus tout en en limitant les coûts, projet que Michel Foucault tient pour exemplaire des formes modernes de coercition.

“Pour John Stuart Mill, ‘il vaut mieux être Socrate insatisfait qu’un imbécile satisfait’”
Catherine Audard

 

John Stuart Mill [1806-1873], le deuxième grand philosophe utilitariste, est tout aussi réformiste mais sur une autre base que celle de la maximisation du plaisir, car il a une vision plus complexe de la nature humaine. Il distingue différents types de plaisir. Selon lui, « il vaut mieux être Socrate insatisfait qu’un imbécile satisfait ». Pour comprendre son rejet de l’utilitarisme version Bentham, il faut savoir que Mill était le fils d’un disciple convaincu de Bentham. Il a été élevé selon les principes utilitaristes, c’est-à-dire qu’il a été formé comme une machine à produire les effets les plus positifs possibles. À 5 ans, il lisait le grec couramment et à 8 ans, il refaisait certaines démonstrations géométriques des Éléments d’Euclide. Mais vers 18-20 ans, il a eu une crise existentielle et a envoyé promener toute sa formation utilitariste. Il a découvert la poésie romantique, celle de Coleridge en particulier, et la pensée idéaliste allemande. Il va donc développer sa propre version de l’utilitarisme, influencée par la pensée de Humboldt et, indirectement, de Hegel : un utilitarisme indirect. Selon Mill, le but de l’action morale est toujours de faire le bien en augmentant la quantité de bonheur et de bien-être de tous, mais cela ne peut pas se faire directement. On atteint ce résultat en visant d’autres buts plus complexes et variés, par une sorte de ruse de la raison. Mill rejette donc l’hédonisme – la recherche du plaisir – et promeut l’eudémonisme, la quête du bonheur. Or le bonheur ne peut pas se calculer ni être atteint directement, il peut même demander le sacrifice de certains plaisirs. C’est un état de satisfaction qui vient en plus de tout le reste. Cette position presque idéaliste et platonicienne, très différente du matérialisme mécanique de Bentham, a inspiré son militantisme politique et social, et, lorsque Mill est devenu député à la Chambre des communes, ses luttes en faveur de l’instruction publique et contre les ravages de l’alcoolisme. Pour lui, tous les plaisirs ne se valent pas et tous ne conduisent pas au bonheur ! 

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Article issu du dossier "Faut-il toujours viser l’utile ?" avril 2021 Voir le dossier
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