Et vous, qu’attendez-vous de votre travail ?
Le graphique
D’après l’anthropologue altermondialiste David Graeber, auteur du récemment traduit Bullshit jobs (Payot, 2018), un nombre croissant de travailleurs, bien qu’occupant parfois des emplois bien rémunérés, aurait le sentiment d’être inutile. Il s’inspire pour cela d’une étude réalisée en Grande-Bretagne selon laquelle 40 % des actifs considéreraient que leur emploi n’apporte aucune « contribution significative à la société ». Qu’en est-il en France ? Et peut-on mesurer plus précisément ce sentiment d’inutilité ? Dans une passionnante enquête (« Inutilité ou absence de reconnaissance : de quoi souffrent les salariés français ? »), la Fondation Jean-Jaurès, associée à l’Ifop, fait apparaître un schéma bien plus contrasté. Première singularité française : une écrasante majorité d’actifs estime que leur travail est utile à leur entreprise (80 %) et apporte une contribution à la société (78 %) – même si des variations fortes apparaissent selon les activités. Ensuite, si l’on demande de hiérarchiser les ressorts de cette utilité selon qu’elle sert « d’abord » l’entreprise, « avant tout » la société ou bien « avant tout » les actionnaires, des disparités apparaissent. Sur la durée, ils sont même 38 % à considérer que leur travail est plus utile à leur entreprise qu’il y a quelques années (contre 11 % qui le jugent plus inutile) et 29 % plus utile à la société (contre 15 % « plus inutile »). Bref, les salariés sont globalement convaincus de l’utilité de ce qu’ils font sur les plans individuel, entrepreneurial et social. Mais c’est sur un autre plan, celui de la reconnaissance de cette utilité que le bât blesse. Seuls 44 % de nos concitoyens affirment que leur travail est « reconnu à sa juste valeur », à la différence de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne et des États-Unis qui enregistrent de 20 à 30 points de plus. Comment expliquer ce déséquilibre entre utilité perçue et déficit de reconnaissance, qui se traduit par des taux d’absentéisme et des burn-out de plus en plus nombreux ? D’après les auteurs de l’enquête, cela tient à une culture qui fait du travail, plus qu’une simple fonction sociale, le lieu de la réalisation de soi : « C’est à travers le travail que les Français espèrent se réaliser en tant qu’individus à part entière, dotés d’une personnalité singulière […]. Le travail est la forme instituante majeure pour les Français. » Or, dans un climat de très grande incertitude, de virtualisation du travail sous le coup du numérique et de scepticisme quant à la capacité des institutions, et notamment des entreprises, à assurer la pérennité du travail bien fait, les Français seraient sur la défensive par rapport à cette dimension « instituante » du travail. L’objet du travail affirmait le jeune Marx est « la réalisation de la vie générique de l’homme ». En façonnant activement le monde, l’homme ne trouve pas seulement le moyen de satisfaire des besoins particuliers, il se réalise lui-même et prend la mesure de ses pouvoirs. Il faut croire que les Français sont les plus marxiens des travailleurs d’aujourd’hui.
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