Édouard Glissant : la créolisation par l’art
Philosophe et poète disparu en 2011, Édouard Glissant a œuvré toute sa vie pour le rapprochement des cultures. L’essayiste Aliocha Wald Lasowski revient sur cet aspect de son œuvre dans son livre Sur l’épaule des dieux. Les arts d’Édouard Glissant (Les Impressions nouvelles, 2022), en s’intéressant à une chose en particulier : les liens entre ses écrits et la création artistique. Présentation.
De la créolisation au “Tout-monde”
Né en Martinique en 1928, Édouard Glissant est connu pour avoir élevé le terme de « créolisation » au rang de concept philosophique. Désignant originellement une simple adaptation des esclaves, arrachés à leur terre natale africaine, au mode de vie caraïbe, aujourd’hui utilisé en politique par Jean-Luc Mélenchon, la créolisation est pour Édouard Glissant, comme il le confiait au journal Le Monde en 2005, un « métissage d’arts ou de langages qui produit de l’inattendu ». Loin d’être un simple accident de l’histoire réservé à une minorité, ce terme désigne pour lui un processus global, toujours plus actuel et irréversible de rencontres et « de bouleversement des histoires et de renouvellement des géographies », autrement dit de recréations culturelles : « Le monde se créolise. Il ne devient pas créole, il entre dans ses diversités » (Mémoires des esclavages, Gallimard, 2007). Comme l’écrit Wald Lasowski : « Dynamique imprévisible, la créolisation n’est ni melting-pot, ni multiculturalisme. » Mais quel chemin trace-t-elle lorsqu’elle se manifeste par la création artistique ?
Elle participe, par irruption (que Glissant nomme « rythme irrué ») à l’avènement du « Tout-monde », autre concept majeur forgé par ce chercheur infatigable de maillages culturels toujours plus nombreux et plus féconds. Dans le néologisme « Tout-monde », c’est le tiret qui est décisif parce que, précise Wald Lasowski, il « n’est pas un centre entre deux mots opposés mais un entre qui relie deux différents ». Admirateur des surréalistes, Édouard Glissant reprend leur intuition fondamentale (la beauté est « convulsive », la « trouvaille » procède du choc des imaginaires), mais pour l’étendre à tous les horizons culturels. Faire la promotion du « Tout-monde », c’est ainsi s’affranchir de toutes les limites, qu’elles soient de genre, d’espace ou de temps, pour magnifier l’art en tant qu’il s’attache à « dévoiler ce qu’on ne voit pas […] fouiller le paysage qui est autour, accorder ensemble des rythmes qui ne se sont jamais connus » (Tout-monde, Gallimard, 1993).
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