Drôle de pâte
Pour le critique Jean Paulhan, les peintures de Jean Fautrier sont représentatives de « l’art informel ». Elles ne figurent pas des sujets précis, mais laissent venir sur la toile, à travers le geste pictural, la densité de l’existence.
Étrange tableau… Ces couches de pâte épaisse, ces traînées rosâtres, ces caillots couleur ciment qui paraissent sortis de la main d’un maçon espiègle ne ressemblent à rien. Pourtant, à y regarder de plus près, cette ligne accidentée joue un peu au profil. Dans son sillage s’esquissent des lèvres, un nez et un menton rougis par le froid, voire le vin. Ou ne serait-ce pas plutôt le bord froissé d’un emballage de boucherie ? De plus loin, on dirait le feuilleté bleuâtre d’un chou coupé en deux ou encore des vagues en train de déferler, dans un assaut de mousse. Libre à chacun d’y voir d’autres choses. Dans quelque sens que nous tire l’imagination, c’est là que réside, pour Jean Paulhan, l’originalité et la profondeur de l’œuvre de Jean Fautrier et de ce que la critique a appelé « l’art informel » (l’art de la forme informe et l’art hors des formes classiques)*.
Trois traits caractérisent cet art, qui rassemble des artistes aussi divers que Jean Fautrier, Henri Michaux, Georges Mathieu ou Joan Miró. Tout d’abord, contrairement à leurs prédécesseurs, les peintres ne créent pas à partir d’idées précises, de sujets médités (un Christ, une bataille ou un naufrage). Ils laissent venir à eux, à travers des gestes, des touches et des taches, des signes qui prendront sens ultérieurement. De là découle une deuxième caractéristique de l’art informel : la vitesse d’exécution, grâce à laquelle sont mises hors jeu la réflexion et la pensée rationnelle. Le même avantage est obtenu par l’emploi d’outils moins « intellectuels » que le crayon ou le pinceau fin – une spatule ou une large brosse dans le cas de Jean Fautrier, qui s’en sert pour labourer un épais enduit à la colle.
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