Charles Péguy : "44 kilomètres en trois jours…"
Extrait – En 1912, son plus jeune fils, âgé de neuf ans, tombe gravement malade. Bouleversé, Péguy fait un vœu. Le 14 juin, d’abord accompagné par Alain-Fournier, il se met en route vers Notre-Dame de Chartres. Après trois jours de marche, il aperçoit dans la plaine de Beauce la « lèche inimitable » de la cathédrale.
« Mon petit Pierre a été malade, une diphtérie, en août, en arrivant à la mer. Alors, mon vieux, j’ai senti que c’était grave. Il a fallu que je fasse un vœu, – ne mets pas ça dans ton canard surtout. – J’ai fait un pèlerinage à Chartres. Je suis Beauceron. Chartres est ma cathédrale. Je n’avais aucun entraînement. J’ai fait 144 kilomètres en trois jours. Ah ! Mon vieux, les croisades, c’était facile ! Il est évident que nous autres, nous aurions été les premiers à partir pour Jérusalem et que nous serions morts sur la route. Mourir dans un fossé, ce n’est rien ; vraiment, j’ai senti que ce n’était rien. Nous faisons quelque chose de plus difficile. On voit le clocher de Chartres à 17 kilomètres sur la plaine. De temps en temps, il disparaît derrière une ondulation, une ligne de bois. Dès que je l’ai vu, ç’a été une extase. Je ne sentais plus rien, ni la fatigue, ni mes pieds. Toutes mes impuretés sont tombées d’un coup. J’étais un autre homme. J’ai prié une heure dans la cathédrale le samedi soir. J’ai prié une heure, le dimanche matin, avant la grand messe. Je n’ai pas assisté à la grand messe. J’avais peur de la foule. J’ai prié, mon vieux, comme jamais je n’ai prié. J’ai pu prier pour mes ennemis : ça ne m’était jamais arrivé. Quand je dis ennemis, tu comprends bien que je ne parle pas des Laudet1 : ceux-là, je suis capable de prier pour eux tous les jours. Mais il y a certains ennemis, certaines qualités d’ennemis, s’il fallait prier pour eux en en temps normal, immanquablement j’aurais une crise de foie ; non, mon foie ne me permettrait pas. Mon gosse est sauvé, je les ai donnés tous trois à Notre Dame. Moi, je ne peux pas m’occuper de tout. Je n’ai pas une vie ordinaire. Ma vie est une gageure. Nul n’est prophète en son pays. Mes petits ne sont pas baptisés, à la sainte Vierge de s’en occuper. J’ai un office, j’ai des responsabilités énormes. Au fond, c’est une renaissance catholique qui se fait par moi. Il faut voir ce qui est, et tenir bon. »
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