Poussin. Une journée en Arcadie

Une recension de Géraldine Mosna-Savoye, publié le

« Et in Arcadia ego », ce rappel inquiétant de la Mort dans l’Arcadie idyllique reste lié aux tableaux de Nicolas Poussin et à ses bergers découvrant avec frayeur le memento mori à l’orée d’une forêt paisible. Au centre de l’œuvre du peintre savant, il y a bien l’Arcadie, cette terre mythique qu’il a arpentée et construite de tableaux en tableaux, et dans laquelle le philosophe Vincent Delecroix nous mène le temps d’une journée. De l’aube au crépuscule, c’est un « paysage de pensée » qui apparaît, « un nom de pays » qui se lit autant qu’il se voit, sans que l’on passe « de la jouissance sensitive à la théorie », mais en se faisant « regardant ». Si Poussin est l’inventeur d’un classicisme qui nous paraît dépassé, c’est pourtant bien, selon le philosophe, des représentations de son Arcadie lointaine que nous sommes faits : tels son Narcisse, qui meurt de ne pouvoir rejoindre son reflet, ou ses bergers, qui déchiffrent les traces de la Mort, Poussin met en scène notre propre regard et nous apprend non pas à « voir des idées » mais à nous voir avec esprit.

À voir :  l’exposition Poussin et Dieu, jusqu’au 29 juin, au musée du Louvre, à Paris.
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