Microfictions 2018
Une recension de Philippe Garnier, publié leMichel Serres déplorait, dans un entretien accordé en 2010 à Philosophie magazine (n° 37), au sujet de la violence sur les écrans, ce qu’il appelle « le retour du sacrifice humain ». Il y voit, par rapport à la lente évolution du sacrifice depuis Abraham, le signe d’une terrible régression. Mieux encore que le premier Microfictions paru en 2007, Microfictions 2018 prend la mesure de ce paroxysme sacrificiel. En cinq cents textes brefs, avec une jubilation noire, Régis Jauffret inocule à son lecteur une dose maximale de violence et de toxicité. La pulsion suicidaire y côtoie l’infanticide, les couples y vivent soudés dans la haine conjugale, le travail y tue à petit feu. La société est un agrégat d’autodestructions plus ou moins lentes. La grande ville juxtapose à l’infini des solitudes atterrées. Très vite, les défenses immunitaires du lecteur sont débordées. Tout scrupule aboli, il descend de plein gré aux enfers. Inclassable mélange de faits divers morbides, de comic strips et de monadologie – chaque histoire semblant le reflet de toutes les autres –, ce livre déploie sous nos yeux sa structure hilarante et empoisonnée.
Où réside sa violence ? Aussi bien dans le crime de sang que dans la vie quotidienne la plus terne. La phrase de Jauffret dose à parts égales la routine et le désastre, comme pour en souligner l’équivalence. « J’étais un méchant fœtus. J’ai donné mal au cœur à maman dès mon arrivée dans son utérus. Elle était obligée de partir à son travail sans avoir déjeuné. Même la photo d’un café lui donnait envie de vomir. […] Au bout de cinq mois j’ai grossi d’un seul coup. Je suis devenu une pierre lourde comme du plomb. » Le principal véhicule du poison, c’est le lien familial. Le carcan conjugal, la nausée parentale et le dégoût filial ne peuvent déboucher que sur un immense désir de purge. Ces vies ne sont pas ratées, rien ne leur manque qui leur était dû, mais le désir qui les porte est vicié à la base, tourné contre lui-même. Contrairement à certaines incantations négatives de la littérature contemporaine, ce livre ne désigne aucun coupable, aucun bouc émissaire. Son oxygène asphyxiant provient d’un mélange unique de rire et de cruauté, qu’on ne saurait assimiler à de l’ironie. Et cette copieuse injure à l’existence apparaît, au fil des pages, comme un remède souverain pour rester vivant.
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