Mes labyrinthes. Vivre avec la différence

Une recension de Jean-Marie Durand, publié le

Porteur d’un trouble de l’attention, diagnostiqué autiste Asperger à 25 ans, Florian Forestier a mis du temps à faire corps avec son stigmate de l’autisme. « Je n’entre dans rien, surtout pas dans la société », observe-t-il dans cet essai en forme de retour sur lui, pour signifier sa difficulté à se plier aux normes des interactions sociales et du langage ordinaire. Aujourd’hui docteur en philosophie et conservateur à la Bibliothèque nationale de France, l’auteur a trouvé une voie à travers la phénoménologie et la littérature – il a publié deux romans. Les mots qu’il « cherche depuis longtemps » répondent aux mots qui l’ont longtemps réduit à sa condition. Forestier a compris que son anxiété s’atténuait à la mesure de ses prises de parole depuis le cœur de son handicap. Comme si le langage lui permettait de conjurer cette « anamorphose », cette « difficulté à mettre en ordre, à donner sens et direction, à savoir qui l’on est, où l’on va, ce que l’on veut dire »… À la question de savoir comment faire justice « à ce qui tremble en nous et entre nous », il répond par l’affirmation de sa différence. Tout en restant conscient qu’il ne sera « jamais quitte du bruit » en lui. Dans cette façon d’indexer un élan créatif à l’inquiétude qui l’abrite, un écrivain se dévoile. « Raconter, c’est ouvrir une brèche […], projeter son ombre. » Au cœur de ce labyrinthe affectif, cette projection brille de feux. Florian Forestier a appris à vivre avec et dans sa différence ; une forteresse secrète mais vibrante.

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