L'infinie comédie
Une recension de Philippe Garnier, publié leCe roman fait penser à une lente, fascinante et impossible désintoxication. Les personnages y sont drogués au cannabis, à l’alcool, aux neuroleptiques, et souffrent d’une lucidité qui leur est insupportable. Étudiants doués et névrosés, jeunes sportifs prometteurs ou dépressifs chroniques, ils sont les vivants symptômes d’une Amérique où la vie quotidienne, à force de confort, de technologie, de compétition, de pharmacopée et de divertissement, rend tout le monde à peu près fou.
David Foster Wallace a traversé de brillantes années universitaires, entre campus et hôpital psychiatrique. Il est intronisé par les écrivains les plus prestigieux des États-Unis. L’Infinie Comédie paraît en 1996, après dix ans de travail. La presse salue cette performance qui mêle la culture la plus intellectuelle au langage le plus populaire. Dix ans plus tard, l’auteur se suicide. Aujourd’hui, son livre culte est enfin traduit en français.
Le labyrinthe romanesque de L’Infinie Comédie défie toute tentative de résumé. On pense à une parodie des romans de Pynchon et de DeLillo. Dans un futur proche, une grande Organisation des nations d’Amérique du Nord (Onan) rassemble les États-Unis, le Canada et le Mexique. Cette société surdéveloppée devient une machine à plaisir, une institution du divertissement programmé. Des agents secrets de l’Onan sont aux prises avec des indépendantistes québécois. L’enjeu est une mystérieuse vidéo qui provoque l’extase et la mort du spectateur.
« Les pensées ne sont plus “triées” pour les besoins du récit mais forment une circonvolution mentale devenant l’œuvre elle-même »
Par cercles concentriques, nous entrons dans la vie intime des personnages : Hal Incandenza, jeune tennisman philosophe, Don Gately, cambrioleur en cure de désintoxication, ou encore Kate Gompert, pensionnaire d’un hôpital psychiatrique. La vraie matière du livre, c’est le fil de leurs émotions, leur pensée incisive et sans cesse entravée, interrompue, leur perception maladive du décor, du bruit des machines, des odeurs chimiques, des visages. David Foster Wallace parvient à présenter des pensées qui ne sont plus « triées » pour les besoins du récit mais qui forment une circonvolution mentale devenant l’œuvre elle-même. Divertissement monstrueux conçu pour saper la culture du divertissement, condensé d’ironie tourné contre l’ironie obligatoire, L’Infinie Comédie, derrière son appareil impressionnant, résonne comme la plainte d’une sensibilité authentique et sincère, condamnée au spectacle et à la consommation perpétuelle.
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