La Leçon de Rosalinde

Une recension de Catherine Portevin, publié le

« Pourquoi Shakespeare ? Parce qu’il […] nous comprend mieux que nous ne nous comprenons nous-mêmes. » L’adage est un peu plat, mais, sur cette platitude, le philosophe canadien Mustapha Fahmi, spécialiste du barde de Stratford, a composé un recueil pensif qui ne manque pas de relief. Il est donc inégal. Dans un style très simple, il alterne lectures shakespeariennes (notamment, la philosophie de l’amour de Rosalinde dans Comme il vous plaira), billets sur des sujets contemporains (l’éducation, l’enseignement des humanités, la reconnaissance…), aphorismes et petites leçons de sagesse. Il y a les banalités du genre (« la sagesse est le silence », « l’art sauvera le monde ») mais aussi des analyses originales, par exemple de Hamlet. Pourquoi Hamlet ne parvient-il pas à tuer son oncle Claudius ? Parce qu’il est trop sensible (Goethe), parce qu’il pense trop bien (Nietzsche), parce que Claudius, en tuant son père et en épousant sa mère, a réalisé à sa place son désir œdipien (Freud) ? Hamlet, répond Fahmi, ne peut agir parce qu’il se définit lui-même comme philosophe, et non comme le prétendant au trône, le vengeur ou l’amant que les autres voient en lui : « Hamlet ne procrastine pas, il philosophe. »

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