Un monde sans odeur ni saveur ?
L’anosmie désigne la perte de l’odorat, si répandue en temps de pandémie de Covid. Négligé par la plupart des philosophes, ce sens est pourtant peut-être celui qui nous fait le mieux connaître le monde. Et quand on le perd, on réussit même à le compenser. Ayez du nez, suivez le guide.
Il faut d’abord savoir que l’odorat ne se perd pas tout seul. Un seul sens vous manque, et tout votre monde (sensoriel) est dépeuplé. À commencer par le goût. Si l’anosmie est aussi une agueusie, c’est parce que ce que l’on appelle « goût » n’est pas seulement la saveur, ni l’odeur : c’est l’association des deux, condensé par le terme scientifique de « flaveur ». C’est cet entremêlement entre le goût, la texture et l’odeur de l’aliment, qui constitue la dimension proprement affective de la nourriture. La texture onctueuse, presque grumeleuse de la crème de marron, n’est donc rien sans l’odeur de la châtaigne !
La perte du goût… des autres
Mais cette perte d’affectivité peut aller au-delà de l’assiette et concerner les relations que l’on entretient avec nos semblables. Car on « goûte » et on « sent » aussi ceux que l’on aime, comme en témoignent les premiers vers du Cantique des Cantiques, un texte biblique composé de poèmes d’amour. « Tes amours sont plus délicieuses que le vin ;/ l’arôme de tes parfums est exquis ;/ ton nom est une huile qui s’épanche. » C’est le principe de la « synesthésie » : les différentes « sensations » s’unissent et se complètent, notamment pour créer le désir amoureux.
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