Qu’est-ce que le nécrocapitalisme ?
Utiliser des cadavres d’araignée pour fabriquer des robots. C’est le projet sur lequel travaille une équipe du Preston Innovation Lab (Texas). De quoi inquiéter certains intellectuels, qui y voient un nouvel avatar, glaçant, de ce qu’ils appellent le nécrocapitalisme.
L’invention paraît sortie du cauchemar d’un arachnophobe. En juillet dernier, une équipe américaine du Preston Innovation Lab de l’Université Rice, à Houston (Texas), a publié un article dans la revue Advanced Science. Elle y détaille la transformation du cadavre d’une araignée… en une pince robotique ! L’idée est relativement simple : puisque le mouvement des pattes de l’animal n’est pas commandé par des muscles mais par un système de pression hydraulique, il suffit d’injecter du liquide dans la carcasse pour en exploiter les fonctionnalités physiologiques.
Une robotique de la mort ?
La nécrobotique, « robotique de la mort », est née. Et ses applications sont jugées prometteuses : cette branche de la robotique permet en particulier de réaliser des manipulations extrêmement délicates, réservées habituellement au vivant, tout en échappant à l’indocilité inhérente à la vie. Les bénéfices sans les inconvénients, en somme. Vous ne pouvez pas, sans de grandes difficultés, mettre à profit le tact des pattes de l’araignée. Pour y arriver, il faudrait la dresser (est-ce seulement possible ?), ou l’inciter à opérer le mouvement précis que vous attendez d’elle. Une fois morte, sa dépouille est infiniment moins récalcitrante, tout en conservant certaines de ses propriétés. Reste à trouver comment préserver le dispositif de la dégradation sur le long terme – ce à quoi s’attelle désormais l’équipe du Preston Innovation Lab.
Une source de profit ?
Les critiques de la nécrobotique sont néanmoins à la hauteur de l’enthousiasme suscité par cette découverte. Dans un article récent, « Along came a spider… and capitalism killed it » les géographes James A. Tyner et Stian Rice y voient un développement inquiétant de ce qu’ils appellent le « nécrocapitalisme ». Tout, aux yeux de l’économie capitaliste, peut devenir une source de profit. On assiste en particulier, au cours de l’histoire du capitalisme, à une « subordination de la vie et de la mort aux circuits du capital ». Même la mort doit être « convertie en une promesse d’utilité, de travail productif ». Le glissement paraît contre-intuitif : si l’on perçoit bien comment le capitalisme pourrait faire travailler la vie à son service, on comprend moins, de prime abord, comme il lui serait possible d’exploiter un cadavre.
La « biotechnologie » utilisée par l’équipe du Preston Innovation Lab en donne pourtant un exemple frappant : à l’aide de dispositifs techniques, la mort peut être directement mobilisée, enrôlée dans une vaste machine économique. Et elle pourrait bien au bout du compte, en raison de sa totale docilité, se révéler plus utilisable, plus valorisable, plus précieuse que la vie dans de nombreux domaines. La mort au service des vivants, stade ultime du capitalisme ?
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