Pourquoi rêvons-nous d’être célèbre ?
Vous vous voyez déjà en haut de l’affiche ? Quatre philosophes sonnent pour vous les trompettes de la renommée.
Parce que nous sommes en quête de pouvoir / Hobbes (1588-1679)
Pour celui qui considère que l’état naturel des hommes est une « guerre de tous contre tous », le désir de gloire n’est jamais immotivé. En effet, quand nous recherchons la célébrité, nous désirons avant tout voir se refléter dans les yeux des autres le signe de notre puissance et de notre supériorité. C’est ainsi que Hobbes écrit dans le Léviathan que « les désirs de richesses, de savoir et d’honneur » peuvent tous être ramenés au « désir de pouvoir ». En définitive, le rêve de célébrité trahit notre volonté d’établir une hiérarchie en notre faveur. Souhaiter briller n’a donc rien d’anodin !
Parce que nous désirons plaire / Rousseau (1712-1778)
Pour Rousseau, l’avènement de la société civile a fait de l’homme l’esclave du regard. Selon lui, « chacun commença à regarder les autres et à vouloir être regardé soi-même ». Dans ce monde d’artifices, le paraître règne aux dépens de l’être. Nous voyons ainsi dans la célébrité un moyen de satisfaire notre soif de regards admiratifs et impressionnés… au risque de verser dans l’inauthenticité. Le philosophe l’a bien compris, lui qui fut d’ailleurs l’une des toutes premières célébrités européennes et un objet de curiosité, avant de se faire « promeneur solitaire », pour fuir les jalousies, les médisances… et herboriser à l’ombre des projecteurs.
Parce que nous voulons nous distinguer / Merleau-Ponty (1908-1961)
Invitations mondaines, sollicitations médiatiques, témoignages d’admiration… En nous donnant une grande visibilité, la célébrité nous permet aussi d’augmenter considérablement le nombre de rencontres décisives dans notre vie. Or, comme le rappelle Merleau-Ponty dans La guerre a eu lieu, « les rencontres mettent au jour dans la vie des possibilités, qui sans elles, se seraient assoupies ». Nous souhaitons donc logiquement l’établissement d’un immense réseau qui ouvre la voie à ces nouveaux « possibles ». Et la gloire nous l’offre, charriant son lot d’opportunités, non pas abstraites, mais bien tangibles, à portée de main.
Parce que nous voulons notre minute de gloire / Baudrillard (1929-2007)
Dans une société qui somme de se « distinguer et de se différencier socialement » par la consommation, il devient alors important pour l’individu d’avoir sa « minute de gloire ». Baudrillard ironise ainsi : « La gloire auprès du peuple, voilà à quoi il faut aspirer. Rien ne vaudra jamais le regard éperdu de la charcutière qui vous a vu à la télévision. » En creux, l’individu devient lui-même une forme de produit pour une société toujours plus avide. Peu importent les raisons qui nous placent sous les feux de la rampe ou la nature de l’audience : l’essentiel est d’avoir ce moment « rien que pour nous », aussi éphémère soit-il.
Faites-vous primer le désir comme Spinoza, la joie à l'instar de Platon, la liberté sur les pas de Beauvoir, ou la lucidité à l'image de Schopenhauer ? Cet Expresso vous permettra de le déterminer !
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