Olivier Haralambon : “Le cyclisme a historiquement été un sport catholique mais il est en passe de devenir un sport protestant”
Passionné de cyclisme, Olivier Haralambon était jusqu’à ses 29 ans un « amateur élite », soit un coureur semi-professionnel. Il a ensuite décidé de poser le vélo pour reprendre des études de philosophie et donner un sens à son expérience du sport de haut niveau. Pour lui, le Tour de France et le cyclisme professionnel représentent une expérience contemporaine du sacré.
Qu’est-ce que le Tour de France représente pour vous ?
Olivier Haralambon : Il me renvoie à de très anciens souvenirs. Cela remonte à 1971 ou 1972, j’avais 5 ans, le Tour représentait les vacances et l’insouciance, les congés de mon père et de mes oncles. On se trouvait à la dernière étape, l’arrivée à Versailles. J’étais dans l’herbe, à côté de la pièce d’eau des Suisses, au milieu des chaises pliantes, des gens qui attendent, des postes de radio allumés. Je me souviens d’une très longue attente, on pouvait presque coller l’oreille par terre pour entendre les coureurs arriver. La radio nous informait : « Ils sont dans la vallée de Chevreuse… dans le bois d’Arcy… ils approchent… » Et d’un seul coup, le passage du peloton, une espèce de vent chargé d’odeurs et de couleurs qui établit un silence grave. Pour l’enfant naïf que j’étais, c’était une expérience du sacré qui se jouait, l’effet d’une procession religieuse, comme un souffle magique. Il y a le petit bruit du peloton, des pneumatiques sur le sol, le bruit des chaînes, et ces corps complètement bronzés, fondus comme à la chaleur, recuits et luisants. Un peu comme des statues. J’y pense pour la première fois, mais mon parrain est très lié à mon histoire cycliste : c’est lui qui m’a offert mon premier vélo et qui m’a emmené rouler. Son père était sculpteur religieux. Et pensant aux mollets fondus et noueux des coureurs, j’ai l’image des statues religieuses. Cette espèce de maigreur qui non seulement a éliminé la graisse, mais le muscle lui-même, qui ne respire plus forcément la santé, mais déjà presque l’amaigrissement. Il y a une ambivalence donc, le spectacle est léger, mais on sent aussi passer sous nos yeux une forme de harassement physique. Le sentiment du sacré, que j’ai ressenti comme un respect évident qui s’imposait de l’extérieur et comme le besoin de tomber à genoux, si j’ose dire, m’est venu de ces moments-là.
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