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© Cdd20 / Pixabay

Témoignage

Mourir, le temps que ça aille mieux – dire et penser la dépression

Julien De Sanctis publié le 29 avril 2023 11 min

La dépression est un terme devenu presque banal. Or sa réalité reste insoutenable. C’est toute son horreur, mais aussi sa signification philosophique profonde, qu’éclaire dans ce récit le jeune philosophe Julien De Sanctis.


Que signifie « vivre » lorsqu’on est en dépression ? Comment la vie est-elle vécue lorsqu’on baigne tout entier dans les eaux acides de cette maladie, lorsque vivre et souffrir se confondent fatalement ? La dépression réduit l’existence à une subsistance. Elle est un voile filtrant notre accès au monde et à nous-mêmes. C’est une maladie de l’expérience et de l’apparaître qui détraque notre perception en la réduisant à une seule et même clé d’interprétation du réel, une seule et même modalité d’existence : une angoisse à la fois innommable, désespérée et désespérante. Mais comment dire et penser cette expérience ? Comment conserver le touchant d’un récit dont l’objet est une souffrance incommunicable ? Essayons.

 

Mer d’intranquillité

Les mois d’avril et de mai 2019 auraient dû être les plus enthousiasmants de ma vie. Ma femme et moi partions trois semaines au Japon, cette « autre face de la lune » – pour reprendre les mots de Claude Lévi-Strauss –, à laquelle je voue une passion aussi irrésistible qu’ambiguë, pleine d’allégresse et de mélancolie. Je n’avais encore jamais expérimenté les vols long-courriers et, bien qu’effrayé par la perspective de passer onze heures enfermé dans la stratosphère, l’excitation m’avait rendu le voyage presque agréable. Mon premier jour sur place ne connut aucune fausse note. Je me revois parcourir les couloirs de l’aéroport de Tokyo-Haneda, transporté par une vibrante sensation d’irréalité. Comment avais-je pu attendre si longtemps avant de venir ici ? Comment pouvais-je être à la fois aussi passionné et aussi attentiste ? Ce qui nous fascine peut aussi, parfois, nous terrifier. Quoi qu’il en soit, cette première journée fut marquée d’un impeccable ravissement. Notre hôtel se trouvait dans le quartier d’affaire d’Akasaka, très prisé des riches expatriés et, à en croire les guides touristiques, des amateurs de shopping de luxe. N’étant ni l’un ni l’autre, nous l’avions surtout choisi pour son calme et sa situation géographique idéale, en plein cœur de Tokyo. Bien loin de la déprimante Défense francilienne, Akasaka se révéla franchement agréable. Notre chambre donnait sur une rue animée, remplie de restaurants lumineux où noren [les rideaux japonais traditionnels] et vapeur vous accueillent juste avant que tonne l’énergique « irasshaimase ! » [une expression employée pour saluer un client pénétrant dans un commerce]. Une centaine de mètres plus loin se trouvait le charmant et surprenant Hie-jinja, un sanctuaire shintō paisiblement juché au sommet d’une colline sertie de gratte-ciel. Parmi toutes les merveilles que j’ai pu côtoyer durant mon séjour, Hie-jinja n’est peut-être pas la plus spectaculaire, mais elle est certainement l’une des plus attachantes et des plus mémorables. Sans l’énorme torii [portail traditionnel] marquant le passage entre le monde physique et le monde spirituel aux pieds de cette éminence très urbaine, on ne saurait pas qu’elle se coiffe d’un sanctuaire dédié à Oyamakui-no-kami, le dieu gardien du mont Hiei. D’en bas, on ne voit qu’une esplanade et des escaliers dont le faîte débouche sur une enceinte arborée. Quelle joie, quelle douceur de découvrir, une fois les marches gravies, cet îlot de quiétude sacrée perdu au milieu d’un océan de bitume. Lorsque je ferme les yeux, j’y trouve, encore aujourd’hui, un refuge pour l’esprit. Le reste de la journée, nous découvrîmes tour à tour les colossaux kokkai [le siège du parlement] et palais impérial japonais, la déroutante gare de Tokyo et le très commerçant quartier de Ginza. Une entrée en matière aussi classique qu’exaltante.

Que signifie “vivre” lorsqu’on est “en” dépression ?
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