Mon bon génie. Gitta Sereny ou l’attention généreuse
Lorsque nous avons proposé à quatre penseurs de nous parler de la personne la plus intelligente qu’ils ont rencontrée, nous nous attendions à des surprises. Mais pas à ce qu’Étienne Klein choisisse d’évoquer Heinz Wismann, sans savoir que nous l’avions également interrogé !
Par Nancy Huston, romancière et essayiste
« Avant d’être présentée à Gitta Sereny [1921-2012], j’avais lu son livre Au fond des ténèbres [trad. fr. Denoël, 2007], un portrait de Franz Stangl, le commandant du camp de Treblinka. J’avais aimé cet ouvrage exigeant, érudit et surtout antimanichéen. Gitta Sereny refusait de réifier le mal ; elle voulait plutôt saisir la manière dont celui-ci surgit dans l’histoire de l’individu et quelle part jouent l’enfance et l’éducation dans le parcours des criminels. Le livre m’avait impressionnée, mais quand j’ai rencontré Gitta, j’ai eu la surprise de faire la connaissance d’une intelligence incarnée. Elle était le contraire d’une universitaire. Les universitaires ont été habitués à écrire des dissertations, à organiser de manière tellement argumentée et rigoureuse leur pensée qu’ils n’arrivent plus à être dans le vif de la création, dans la chair de l’existence. Mais Gitta n’était pas non plus une journaliste brillante. Elle avait transformé son âme, sa voix et son corps – son être – en communication, curiosité et échange. J’ai rencontré nombre de gens intelligents dans ma vie – scientifiques, physiciens, neurologues, personnalités reconnues… –, mais jamais je n’ai senti une telle harmonie entre la personnalité et la pensée.
La journaliste et écrivain Gitta Sereny a été l’une des premières à recueillir les confidences d’un criminel nazi. De ses entretiens avec Franz Stangl, le commandant de Treblinka, est né un livre, Au fond des ténèbres. Sa réédition chez…
Longtemps, les femmes n’ont pu marcher seules. Et si elles en savourent aujourd’hui le plaisir, elles ne le font pas toujours sans risques. Nancy Huston invite les femmes à la vigilance : car si la marche est pour elles le…
Le philosophe Thierry Paquot rend hommage à la « pensée pensante », jaillissante et généreuse, d'Henri Maldiney, disparu le vendredi 6 décembre 2013.
Difficile d’imaginer deux pensées plus antagonistes que celles de Roland Jaccard, nihiliste disciple de Schopenhauer qui n’a jamais voulu d’enfants, et Nancy Huston, féministe ayant d’abord refusé d’être mère avant de changer d’avis. L…
L’une est philosophe et analyse l’effet de nos fictions sur le réel. L’autre est neuroscientifique, spécialiste des mécanismes de la croyance…
En exploitant notre attention comme une marchandise, le monde de la consommation et de la production nous laisse hébétés. Yves Citton, qui a contribué à introduire en France la notion d’« économie de l’attention », explique comment nous…
À l’époque de Facebook, de Twitter, du marketing viral et du “multitasking”, un nouveau secteur est né : l’économie de l’attention. Son but ?…
Jacques Derrida, grande figure de la “French Theory”, passe pour un auteur difficile. À moins, comme le conseille son ami Jean-Luc Nancy, de le lire en écoutant d’abord sa “musique”, sa voix. Et en ayant à l’esprit qu’il veut démontrer…