Les débuts de la fin

Stéphane Audeguy publié le 3 min

Les prequels racontent le passé des grands héros. Proposant une explication univoque du monde, ils sont une manne providentielle pour l’industrie du cinéma.

Depuis vingt ans, les antépisodes (prequels, en anglais) se multiplient au cinéma. Il s’agit de ces œuvres consacrées au passé des héros d’un film déjà existant. L’idée de créer des antépisodes n’est certes pas neuve : la littérature médiévale européenne connaît des « enfances Tristan », par exemple, qui prolongent vers le passé Tristan et Iseut. Mais pourquoi le cinéma actuel trouve-t-il là un modèle récurrent ? Bien sûr, on peut évoquer la stérilité de notre époque ; la tentation de recycler un héros que les plus jeunes n’ont jamais vu au cinéma ; enfin et surtout, l’appât du gain, puisqu’on ne produit pas d’antépisode d’un film s’il n’a pas, comme on dit pudiquement, trouvé son public.

Cependant, il est bien plus intéressant de s’intéresser à la métaphysique du genre. Les antépisodes portent souvent sur des héros criminels et proposent, dès lors, une généalogie du mal : Hannibal Rising, Massacre à la tronçonneuse ou même les épisodes I à III de Star Wars en témoignent. Un petit Lituanien voit sa sœur mangée par des apprentis SS ? Il devient Hannibal Lecter. Abandonné à sa naissance dans une poubelle, un employé des abattoirs devient un tueur le jour où on le licencie : ainsi naît Leatherface. Anakin Skywalker, jeune garçon prématurément séparé de sa mère, trahit l’éthique chevaleresque des Jedi… Dans notre monde laïcisé, le criminel monstrueux incarne l’énigme du mal ; et ce au moins depuis les années 1930 : Scarface, M le Maudit. L’antépisode prétend remonter aux « origines du mal » (sous-titre de la version française de Hannibal Rising), mais sans recourir à des schémas téléologiques religieux : les psychopathes sont diaboliques, mais ne sont ni le diable ni ses créatures.

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