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Jean-Antoine Watteau (1684-1721), “Contrat de mariage et bal champêtre”, huile sur toile, vers 1712-13, musée du Prado, Madrid (Espagne). © Bridgeman images

Un classique éclaire le présent

Le dancefloor est-il démocratique ?

Clara Degiovanni publié le 06 juillet 2021 3 min

Plus d’un mois après les salles de spectacles, c’est au tour des clubs et boîtes de nuit d’ouvrir leurs portes le 9 juillet. Dans sa Lettre sur les spectacles (1758), adressée à d’Alembert, Rousseau critique sévèrement le théâtre et son côté bourgeois, et propose un éloge étonnant du « bal entre jeunes gens ». La scène de danse, à l’inverse de la scène de théâtre – qu’il juge artificielle et aliénante –, aurait selon lui des vertus démocratiques. Si fort heureusement, nous n’avons pas à choisir entre les boîtes de nuits et les théâtres, découvrons les arguments rousseauistes en faveur de la fièvre du samedi soir.

 

  • Danse populaire et théâtre bourgeois. Rousseau a une sacrée dent contre les spectacles. Selon lui, ils sont toujours trop chers, et introduisent « le goût du luxe » chez les honnêtes citoyens, en les détournant de leur travail. À l’inverse, le bal est facile à mettre en place. Nul besoin de louer des costumiers, ni de faire de la promotion : « Plantez au milieu d’une place un piquet couronné de fleurs, rassemblez-y le Peuple, et vous aurez une fête », écrit-il dans sa lettre de 1758. Pour briller en société, allez donc au théâtre, mais pour faire la fête honnêtement, filez au bal du village, peut-on lire en substance dans cette réponse à d’Alembert. Mais Rousseau ne connaissait pas les clubs select et leur sévère filtrage à l’entrée… Cet argument ne fonctionne donc plus dans le monde actuel. Cela fait longtemps que certaines boîtes de nuits sont bien plus élitistes que n’importe quel fauteuil de théâtre.
  • Le dancefloor pour faire corps. « Donnez les spectateurs en spectacle ; rendez-les acteurs eux-mêmes ! », plaide Rousseau. C’est sur ce point que la scène du dancefloor, abolissant le mur entre les spectateurs et les acteurs, peut être considérée comme plus démocratique que celle du théâtre. Pour Rousseau, en devenant acteurs de leurs fêtes, les citoyens s’entraînent indirectement à s’investir dans la vie politique de leur pays. Chez Jean-Jacques, le corps-à-corps des soirées dansantes préfigure le corps politique. Si aujourd’hui, la musique électronique peut avoir tendance à esseuler les danseurs, qui préfèrent souvent se déhancher seuls, l’argument reste valable. Danser sur un rythme commun permet de vivre dans sa chair un moment de solidarité très fort, analogue à ceux qui peuvent avoir lieu dans la vie politique ou dans toute expérience de masse.
  • S’unir librement par la danse… seulement si on a de la chance ? Rousseau n’y va pas par quatre chemins : le bal est un haut lieu de séduction. La salle de danse est selon lui l’endroit parfait pour que les jeunes gens puissent « prendre du goût l’un de l’autre ». Pour le philosophe, « hips don’t lie ! » – puisqu’il considère que les mouvements des corps ne mentent jamais et en disent plus long que n’importe quelle conversation. « Peut-on, demande-t-il, imaginer un moyen plus honnête de ne point tromper autrui ? » Lors des bals, les jeunes gens peuvent ainsi se choisir librement, en suivant « leurs cœur » et non « l’état des biens ». Si ces unions sont préférables « aux nœuds bien mal assortis » des mariages arrangés, cette liberté de choisir ne va pas sans une forme d’injustice. « La figure » ainsi que « la parure » ont une importance capitale. Disgracieux ou mal vêtus ? Passez votre chemin. C’est encore bien souvent le cas dans les boîtes de nuit traditionnelles et leur fameuse « tenue correcte exigée » à l’entrée… comme à l’intérieur, où chacun continue de jauger son prochain avant tout sur les critères immédiats de l’apparence. De quoi faire perdre un point au bal (et au dancefloor) en termes d’ouverture et de tolérance.
  • Un dancefloor sous surveillance. Il est un problème que Rousseau ne mentionne pas directement : le sentiment d’insécurité que certains peuvent ressentir dans les discothèques (surtout lorsque l’on est une jeune femme, ou de nature plutôt timide). L’auteur de La Lettre sur les spectacles a cependant anticipé une étrange parade à ce mal. La jeunesse doit selon lui avoir « les yeux du public incessamment sur elle » afin que règnent entre les danseurs « la décence et la circonspection ». Et ce n’est pas tout : le public du bal idéal de Rousseau est composé des parents, et même des grands-parents des danseurs ! À son époque, ces derniers se doivent de faire une révérence aux anciens avant d’accéder à la salle de bal « pour s’accoutumer de bonne heure à respecter la vieillesse ». On s’en doute : tous ces spectateurs imposent à ces lieux « une gravité dont on ne saurait sortir un instant ». Espérons qu’à leur réouverture, les clubs traditionnels restent agréables pour tous sans avoir besoin de ce genre de surveillance un tantinet oppressante !
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