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Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, le 23 Janvier 2022. © ErIc Dessons/JDD/SIPA

Rencontre exceptionnelle

Laurent Berger : “Le maintien de cette réforme conduirait à une impasse démocratique !”

Samuel Lacroix publié le 10 février 2023 17 min

Laurent Berger s'est imposé comme l'une des figures centrales de la contestation contre la réforme des retraites. Le secrétaire général de la CFDT nous a accordé un long entretien, où il explique pourquoi le report de l’âge de départ à la retraite suscite tant le mécontentement des Français. À la veille d’une nouvelle journée de mobilisation, il dénonce une réforme qui passe à côté des grands enjeux qui traversent aujourd’hui le monde du travail.


Alors que prend place ce samedi la quatrième journée de mobilisation contre le projet de réforme des retraites, considérez-vous que la stratégie syndicale consistant à étaler les journées de grève dans le temps tout en cherchant l’appui de l’ensemble des Français est un succès ? À terme, peut-elle vraiment faire bouger les choses ?

Laurent Berger : Depuis le départ, l’union des syndicats contre cette réforme est fondée sur un point très clair : le refus catégorique du report à 64 ans de l’âge légal de la retraite. Car c’est le paramètre le plus injuste et le plus inégalitaire sur lequel on puisse tabler. Le gouvernement a commencé par prétendre qu’il s’agissait d’une réforme de justice et de progrès social. Nous avons fait la démonstration qu’elle était injuste parce qu’elle pénalisait ceux qui ont commencé tôt ainsi que les femmes. L’opinion l’a compris. Le gouvernement a alors prétendu qu’il s’agissait d’assurer l’équilibre du système. Les interventions des experts et du monde intellectuel ont montré que le système n’était pas fondamentalement menacé. Dorénavant, le gouvernement essaie de faire croire qu’il s’agit d’un mouvement qui oppose la “France qui travaille” contre la “France de la paresse”. Mais il suffit d’observer les personnes qui se mobilisent dans la rue pour comprendre que ce sont des travailleurs très attachés à leur emploi, issus de tous les métiers et de tous les territoires, qui se mobilisent. Le 31 janvier, nous avons assisté à la plus importante mobilisation en nombre, même selon les estimations de la police, depuis plus de trente ans. Et tout cela sans bloquer le pays, ni porter atteinte aux biens et aux personnes, ni menacer la liberté de mouvement de la population. Nous avons ainsi fait la démonstration qu’il est possible de sensibiliser l’ensemble des citoyens à une opinion très largement partagée dans le monde du travail de manière pacifique et conviviale. C’est un succès et une grande satisfaction démocratique. Second élément de réponse : avant de porter sur des revendications précises, un vécu partagé du travail s’exprime dans ce mouvement. Cela transparaît nettement dans la diversité sociologique et géographique des manifestants : ils viennent de toutes les professions et de tous les territoires. Quand je remonte les cortèges de la CFDT, je rencontre des travailleurs de la propreté, du bâtiment, de l’accompagnement, du soin, de la santé, des transports. C’est la France des travailleurs et des travailleuses qui font leur boulot du mieux qu’ils peuvent mais qui n’en peuvent plus. Et, oui, cette France-là est décidée à faire bouger les choses.

“Passer en force devant 1,3 million de manifestants pacifiques après avoir cédé à 280000 ‘gilets jaunes’ usant parfois de violence, c’est délivrer une dangereuse prime à la radicalité”
Laurent Berger

 

À vous entendre, on a le sentiment que vous avez cherché à éviter le précédent du mouvement des « gilets jaunes » qui avait échappé aux syndicats.  Cependant, cette modération vous est aussi reprochée par ceux qui redoutent qu’elle permette au gouvernement de passer en force… Et qui appellent au blocage du pays. Que répondez-vous ?

Si, quand il y a 1,3 million de personnes qui manifestent calmement et pacifiquement dans la rue à plusieurs reprises, on passe en force, alors que l’on a cédé peu de temps auparavant face à 280 000 « gilets jaunes », qui s’en prenaient parfois avec hargne aux forces de l’ordre et aux biens publics, alors, oui, il y a un vrai problème démocratique dans ce pays. Ce serait donner une prime à la radicalité. Je ne suis pas en train de dire que le mouvement des « gilets jaunes » n’était pas légitime. Je dis que ceux qui dirigent ce pays et que ceux qui font les lois ne peuvent pas ne pas répondre à cette mobilisation. Sinon, nous serions dans une impasse démocratique.

 

Qu’entendez-vous par là, concrètement ?

La légitimité démocratique s’acquiert par deux voies. D’abord, par le vote pour ceux qui dirigent le pays. Mais la vie démocratique ne s’arrête pas le soir du second tour de l’élection présidentielle ou de l’élection parlementaire. Elle passe aussi par l’exercice de la responsabilité, par la manière dont la fonction qui vous est confiée est exercée tout au long du mandat, ce qui implique de savoir réagir aux événements et d’écouter les évolutions en cours. Si l’on fait fi de cette deuxième dimension en considérant que l’élection suffit, on entre dans une impasse. Dans la situation actuelle, je peux vous garantir que si le gouvernement passe en force et se montre incapable d’entendre le grand refus qui s’exprime, il y aura une gigantesque vague de ressentiment dans la société et dans le monde du travail. Il ne faudra alors plus compter sur les travailleurs pour accepter de participer aux transformations qu’exige la transition écologique. Or cette transition ne pourra pas se faire contre les travailleurs, car elle exige des évolutions des modes de travail, des déplacements d’emploi, l’acquisition de nouvelles compétences dans toute une série de secteurs clés. Si le gouvernement passe en force, je le répète, la société va se figer dans le ressentiment.

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