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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Édito

Éloge des idées vécues

Alexandre Lacroix publié le 11 juillet 2012 3 min

Les idées ou la vie : qu’est-ce qui compte le plus à vos yeux ? Les idées, dans leur perfection de galet poli, leur rassurante minéralité ? Ou la vie, dans sa fluidité, sa coupable et ingouvernable évanescence ?

Pour ma part, c’est à la vie que j’accorderais la primeur. C’est-à-dire que les idées me paraissent avoir une valeur, bien sûr, mais pas tout à fait une valeur intrinsèque. Elles ne sont pas à contempler avec un regard d’immortel. Chaque idée se présente au contraire comme un événement vivant, au sens où elle est suscitée par des circonstances, qui lui donnent une incarnation, mais aussi par une tonalité et une profondeur débordant sa simple énonciation. Un visage entraperçu dans la rue peut suggérer une idée de la beauté ; la honte d’avoir été surpris, adolescent, en train de commettre un vol, une certaine idée de la culpabilité ; un regard posé sur l’océan, une idée de l’infini. Ainsi, les idées sont des pierres précieuses, que l’on peut sculpter – et le métier de philosophe s’apparente à celui de diamantaire –, mais, à l’état brut, elles sont toujours comprises dans la gangue rugueuse du monde vécu.

Au fond, être idéaliste, c’est soutenir le point de vue inverse. C’est se convaincre que l’idée contient davantage de vérité que l’instant qui l’a vu naître, c’est parier que la pensée ne se dessèche jamais, au contraire de la fleur du même nom, si elle est coupée de son terreau natal. La limite d’une telle vision des choses est qu’elle dévalue l’expérience. Être idéaliste, c’est être prêt à mourir pour des idées. D’accord, en général, les idéalistes ne sont pas courageux à ce point-là. Et, néanmoins, ils valorisent davantage la sphère des idées – si pure, si froide – que celle de la présence au monde.

Pour les matérialistes – et cette pétition de principe est aussi l’aveu d’une certaine impuissance à se mouvoir dans l’universel –, les idées ont à peine plus de valeur que, mettons, les sensations. Elles sont suscitées par les frottements divers de la conscience avec les autres et les choses. Elles ont une histoire. Et, ce qui importe, c’est moins la part d’absolu qu’elles recèlent – leur absurde prétention à surplomber le monde –, que leur contingence, autrement dit l’assemblage de hasards ayant permis leur formulation. Aussi, pour un matérialiste conséquent, il existe des ouvrages encore plus complets que les traités de philosophie : ce sont les grands romans, de Fiodor Dostoïevski, de Marcel Proust, de Thomas Mann, de William Faulkner, de James Joyce. La force des grands romans est de ne pas introduire de rupture entre la pensée et la vie, de tenir assemblées ces deux dimensions complémentaires. Les romanciers montrent quelles situations déclenchent le surgissement des idées dans la conscience de leurs personnages. Ils ne se contentent pas d’énoncer le simple résultat de la pensée, mais réinsèrent celui-ci dans les méandres de l’existence.

Imaginez que vous atteigniez le sommet d’une montagne en téléphérique : vous y jouirez de la beauté de la vue, mais pas aussi complètement que si vous aviez fait l’ascension à pied. Le traité de philosophie est le téléphérique qui vous transporte presque miraculeusement au royaume des idées. Le roman est la randonnée qui vous offre les mêmes visions et les mêmes lumières sur le monde, mais en vous faisant goûter, en prime, le sel de l’effort précédant la contemplation.

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