"Comme Léa Salamé, sans téléphone, nous sommes privés de notre rapport à nous-mêmes"
« Je ne sais pas comment ça s’est passé, je n’ai même pas encore récupéré mon téléphone. » C’est ainsi que la journaliste Léa Salamé, qui venait d’animer trois heures de débat entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron, a d’abord réagi alors qu’on lui demandait ce qu’elle en avait pensé. Un réflexe que nous sommes de plus en plus à avoir quotidiennement : le besoin d’en passer par notre téléphone pour faire sens de ce qui nous arrive, alors que nous vivons pourtant l’expérience en première personne. Dans son dernier livre, La Bienveillance des machines, le philosophe et essayiste Pierre Cassou-Noguès s’intéresse à ce nouveau rapport que nous entretenons avec nos machines, auxquelles nous déléguons le soin de mesurer notre température, de connaître notre humeur, de clarifier notre pensée – en un mot, de sonder notre intériorité.
Que vous inspire la réponse de Léa Salamé ?
Pierre Cassou-Noguès : Je me mets à sa place, et il me semble que dans des circonstances analogues, j’aurai la même impression, aliénante et étrange : avoir participé à un événement hyper-intense, stressant au possible, et ne rien pouvoir en dire avant d’avoir consulté mon téléphone. Comme si nous avions besoin de cet outil « intelligent » et du détour par les autres pour clarifier nos pensées, pour savoir ce que nous pensons de ce que nous avons pourtant vécu de l’intérieur et au plus près de l’événement. Mais ne nous sentons pas tous dorénavant perdus ou désorientés quand nous nous rendons compte que nous avons oublié notre téléphone à la table d’un café ? Comme si nous ne pouvions plus nous orienter dans le monde qui nous environne sans cet outil. L’angoisse que l’on ressent quand on perd ou qu’on est privé d’accès à notre téléphone, c’est le sentiment d’avoir perdu notre rapport à l’extérieur autant qu’à nous-mêmes, car cet objet perdu recèle notre mémoire, les photos que nous n’avons pas stockées sur le cloud, les notes que j’ai prises, les livres que je suis en train de lire.
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