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Une recension de Philippe Garnier, publié le« Écrire un poème après Auschwitz est barbare », écrivait Theodor W. Adorno en 1949 dans « Critique de la culture et société » . L’expérience des camps ne relève pas de la veine du romancier ni de l’habileté du scénariste. Il est très rare que la littérature, soixante-quinze ans plus tard, puisse la porter sans l’altérer ou la banaliser.
Dans un bref épilogue, Yves Flank dédie son texte à « Perla et Rachel, mes grands-mères inconnues », celles dont les « histoires jamais racontées » désormais l’entourent. Dans une langue extrêmement juste, il fait revivre ce qu’il a pu savoir, sentir, rêver de la fin de leurs existences. La scène ? Un wagon de déportés pendant la Seconde Guerre mondiale. Les personnages, l’enfant, la femme rousse, l’« homme brun qui n’a jamais porté d’étoile » parlent des langues différentes et se comprennent malgré tout. Des liens se tissent, sur fond de solitude extrême, alors même que l’autre vous prend le peu d’air qui reste à respirer.
Ce qu’Yves Flank ressuscite, ce sont d’abord leurs rêves, ou plutôt l’énergie de rêver qui surgit à l’approche du néant. Dans de longues phrases cadencées, comme secouées par le rythme du convoi, s’affrontent des cellules de mort et des cellules de vie, des détails sordides et de fugitives promesses de bonheur : « Ses voisins la repoussent, tentent de l’entourer d’une frontière invisible, un morceau de planche, un papier, la femme rousse se précipite sur la porte, hurle, cogne, s’agrippe aux barres métalliques ceinturant les battants, […] deux femmes âgées s’approchent des cheveux rouges en titubant, lui parlent doucement, s’affaissent avec elle sans lâcher son regard, Kim, kim, arayn et d’autres mots encore, des caresses, la femme rouge sombre d’un seul coup dans le sommeil de rage et d’épuisement, une mésange se pose sur le barbelé du soupirail puis s’envole dans un cahot. »
Ensuite, dans une intense psalmodie, où chaque page commence par « Sors-moi de cet enfer », le « Cantique de la femme rousse » fait basculer ce texte non pas vers le récit de l’extermination mais vers un appel aux vivants. Puis vient, aigu et sans illusion, le regard du narrateur sur le Paris des rafles. Certains événements sortent de l’Histoire, en ce qu’ils atteignent une limite absolue. Au bout d’un certain temps, seule la voix d’un écrivain peut encore le faire savoir.
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