Nous
Une recension de Martin Duru, publié le1. Nous
C’est très varié, élastique, plus ou moins (é)tendu. Une famille, une nation, une génération, un parti, une religion, une minorité agissante : tout cela, ce sont des « nous », et parler à la première personne du pluriel est un acte éminemment politique. En quoi ? Tristan Garcia dégage une « structure commune » à tous les nous : à chaque fois, il s’agit d’opérer un partage, un « système de découpe ». Paradoxe : un nous est aussi bien ce qui rassemble des individus autour de valeurs et de revendications, et ce qui divise, crée une opposition ; un nous s’érige face à un « eux » (exemple : le nous végétarien contre les mangeurs de viande). Une identité collective se pose en s’opposant, son affirmation est indissociable d’un effet de contraste.
2. Contraction
L’ouvrage propose un diagnostic sur le contemporain : nous vivons la « décomposition des catégories classificatoires » comme l’espèce, le genre, la classe, etc. Elles sont remises en question, leurs frontières s’estompent ; ainsi les antispécistes attaquent l’idée d’une différence de nature entre l’homme et l’animal. De manière générale, l’universalisme, qui cherche à établir des nous très étendus, éveille la suspicion. Selon Garcia, qui observe le phénomène sans le juger, la tendance est bien au particularisme, à « l’inflammation généralisée du sens des différences, des communautés » – à la prolifération de nous contractés qui se raidissent les uns contre les autres, ou contre la société. L’« état de guerre de toutes les identités » est déclaré.
3. Déchirement
Cette « guerre de nous contre nous » concerne tout un chacun. Toute personne est un composé d’appartenances multiples qui ne se recouvrent pas toujours et parfois s’affrontent. Selon les circonstances, « l’ordre des priorités des nous » en nous est chamboulé, une identité s’impose – quand le « nous Noirs » prend le pas sur le « nous Américains »… Dans le déchirement, quel nous choisir, le nous resserré (intense mais excluant) ou le nous élargi (plus vague mais plus ouvert aux autres) ? Garcia renvoie dos à dos l’universalisme et le particularisme. Il élabore un « modèle » de compréhension : chaque époque et chacun d’entre nous, est tiraillé oscillant entre le désir de défendre une différence et l’aspiration contraire à retrouver le sens du commun.
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