Lire et vivre

Une recension de Catherine Portevin, publié le

Il fut « l’homme le plus merveilleux qu’il m’ait été donné de fréquenter. » C’est avec la ferveur d’un Montaigne parlant de La Boétie qu’André Comte-Sponville rend hommage à Tzvetan Todorov, cet « ami si proche, si tendrement, si fortement aimé ». Un an tout juste après sa disparition paraît un ultime ouvrage Lire et Vivre (Robert Laffont/Versilio), recueil d’articles, de conférences, de préfaces ou de tribunes données par l’historien des idées un peu partout dans le monde ces vingt dernières années. La diversité des sujets, des circonstances et des approches – de la géopolitique récente à La Traviata, du devoir de mémoire à Romain Gary, de la défense des sciences humaines à celle de l’humanisme critique… – dit à elle seule l’étendue universelle de ses intérêts. Il travaillait encore à sa composition, avec ses enfants, à la veille de sa mort. Car composer un livre, pour Tzvetan Todorov, était un art de penser. La cohérence du propos, la logique d’un classement, l’esthétique de la couverture, le titre enfin : tout devait avoir du sens. Il avait ouvert un dossier, inscrit dessus « Livres/Vivre » et commencé à y ranger des références. André Comte-Sponville participa à l’achèvement du volume et le préface. De Todorov, le philosophe aime à raison qu’il sût être à la fois « le plus savant » et « le plus clair » : « trop de clarté […] pour que les cuistres consentent à le trouver profond ». Outre le pur intérêt de continuer à lire Todorov, ce volume donne à sentir, de Comte-Sponville à Todorov, et de Todorov à tous les auteurs qu’il médite, la vertu secrète de l’admiration. Vertu humaine et intellectuelle, sans laquelle il n’est pas d’amitié, et fort peu de pensée.

Sur le même sujet
Le fil
1 min
Clara Degiovanni

Lire 400 pages en 90 minutes. C’est la « performance » réalisée par Mohamed Koussa, champion du monde de… lecture rapide. L’un des buts de cette…

Passionnés de lecture rapide : peut-on vraiment lire vite et bien ? 




Article
3 min
Tzvetan Todorov

Dans son livre L’Orientalisme (1978), Edward Said ne cherchait pas, comme on l’a cru parfois, à réhabiliter un « Orient » qui aurait été maltraité dans le…

Plaisirs minuscules



Article
2 min

Le théoricien de la littérature et historien des idées Tzvetan Todorov est mort mardi 7 février à l’âge de 77 ans.

L’essayiste Tzvetan Todorov est mort