Derrida
Une recension de Juliette Cerf, publié leCombien de films tiennent leur titre d’un personnage philosophique ? Derrida de Kirby Dick et Amy Ziering Kofman est de ceux-là. Un portrait du penseur né en 1930 et mort en 2004 ? Entendez plutôt une expérience intrigante, un objet hybride croisant documentaire et philosophie. Et un brin « gonflé », dans tous les sens du terme. Car promis à réformer les entendements qui auront embarqué en compagnie du penseur français de la déconstruction, adulé aux États-Unis. « Et si quelqu’un changeait, non pas ce que vous pensez de tout, mais tout de votre façon de penser ? » À l’inverse de ce qu’en laisse croire un tel slogan ampoulé, bannière de l’édition DVD, le film vaut par ses failles, ses fêlures, son incapacité à construire de « la » pensée. Le spectateur en ressort perplexe. Cherchant à « expérimenter la déconstruction visuellement », le film suit Derrida dans son quotidien : chez lui, dans la rue, jusque chez son coiffeur. « Jackie » y revient sur les injures antisémites vécues durant son enfance en Algérie ou raconte sa rencontre avec sa femme. C’est bien ce mot « raconter » qui pose problème. Derrida évoque son incapacité narrative, sa difficulté à « improviser ». Il se pose en creux comme un penseur de l’écrit. Seul à même de coucher sur le papier sa distinction entre différence et différance ? « Quel philosophe auriez-vous aimé avoir comme mère ? » lui demande-t-on au débotté. Subitement, les yeux du père de la déconstruction, qui héberge chez lui les couches de sa petite-fille, s’illuminent. Un gouffre s’ouvre. Une impasse, la déconstruction interrogeant justement la vision masculine, « phallogocentriste » de la pensée… Derrida accouche alors d’un génial scénario fantastique, brouillant la chronologie généalogique : cette mère philosophe ne pourrait exister que sous la figure d’une héritière.
1930 Il naît à El Biar, près d’Alger.1956 Il obtient l’agrégation de philosophie.1967 Il fait une entrée remarquée dans l’arène intellectuelle avec la publication coup sur coup de deux essais et d’un recueil d’articles : La Voix et le Phénomène, De…
Jacques Derrida, grande figure de la “French Theory”, passe pour un auteur difficile. À moins, comme le conseille son ami Jean-Luc Nancy, de le lire en écoutant d’abord sa “musique”, sa voix. Et en ayant à l’esprit qu’il veut démontrer…
Ils auraient rendu “respectable le fait de se montrer cynique envers les faits et la vérité” : le philosophe américain Daniel Dennett tacle les…
Tel écrit qui croit comprendre Jacques Derrida quand il évoque l’écriture. Pas de panique, on a suivi son texte à la trace.
« Déconstruction » est un mot qui doit à la longue disparaître, c’est ce que pensait et souhaitait Derrida comme on peut le lire dans sa Lettre à un ami japonais. Il n’en a rien été jusqu’ici, comme nous le savons, et ce terme, qui…
Jacques Derrida (de son vrai prénom Jackie) est né le 15 juillet 1930 à El Biar, près d’Alger. Issu d’une famille juive qu’il décrira comme « banalement pratiquante », il est marqué à vie par les discriminations subies par les Juifs d…
On trouvera dans les pages qui suivent l’intégralité de la Lettre à un ami japonais. Ce texte, datant de 1985, est repris dans Psyché. Inventions de l’autre (Galilée, 1987), volume qui rassemble plusieurs articles et interventions de Derrida. La…