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Politique. Municipales

Thierry Paquot: “Il faut inventer un ménagement des gens, des lieux et des choses”

Thierry Paquot publié le 19 mars 2014 4 min
Pour Thierry Paquot, philosophe de l’urbain “rhapsode” de la revue “L’Esprit des villes” (Infolio, 2014), l'urbanisme ne convient plus comme façon d'organiser la cité. Il faut inventer de nouvelles manières de “faire ville”, même petite.

Y a-t-il un aménagement urbain et une politique de la ville de droite et une autre de gauche ?

Thierry Paquot: Cette distinction ne fait plus vraiment sens, l’on peut trouver une municipalité de droite qui encourage les comités de quartier, défend la gestion publique de l’eau, privilégie une cantine scolaire bio avec des produits locaux ou la gratuité des transports en commun, sans oublier le maire populiste qui « soigne » ses « pauvres » s’ils sont français, et une municipalité de gauche qui abandonne à des promoteurs privés la production de logements, accorde à des groupes multinationaux la distribution de l’eau, supprime les bancs publics, pourchasse les SDF, privilégie les automobiles, etc.

Une élue ou un élu écologiste devrait être reconnaissable par sa manière totalement neuve et originale de poser les questions et de trouver des solutions. L’écologie, par définition, établit les relations entre les éléments constitutifs d’un ensemble. Cette méthode d’interaction traverse tous les services municipaux et ne se limite pas à la délégation aux parcs et jardins !  L’écrasante majorité des élu(e)s de droite comme de gauche, et de leurs extrêmes, n’a guère de compétence en urbanisme, en architecture et un peu plus en politique de la ville, souvent perçue comme une source de financements (l’image du robinet est fréquent dans les discours des édiles)…

« L’architecture n’est comprise que comme “image”, pour le marketing urbain »

L’urbanisme, ce moment occidental de concevoir et d’organiser la ville productiviste, ne répond plus à la situation actuelle. Il faut inventer un ménagement (du verbe « ménager » qui signifie « prendre soin ») des gens, des lieux et des choses, on en est loin ! Il est plus facile de faire comme les autres : d’inutiles ronds-points à sens giratoire, des clusters, des « écoquartiers », un tramway sur rail, un centre commercial, etc. L’architecture n’est comprise que comme « image », pour le marketing urbain, d’où l’appel à des starchitectes, souvent bien éloignés de la réalité du terrain… Il y a toute une culture urbaine à acquérir qui exige du temps, des visites, des lectures et des rencontres avec des militants d’associations, des artistes, des spécialistes, des praticiens, etc. Or l’élu(e) à peine arrivé(e) au pouvoir se préoccupe de sa future réélection et souhaite inaugurer le maximum de bâtiments dont la presse parlera. Le recyclage, la réhabilitation, l’expérimentation, l’auto-construction, etc., n’ont pas le panache du flambant neuf et sont pourtant d’excellentes manières de « faire ville ».

 

Que peuvent changer ces élections s'agissant du paysage urbain, dans les grandes villes et dans les petites communes ?

Rien. Les paysages urbains dépendent largement des infrastructures ferroviaires et autoroutières, de l’implantation des zones de chalandise, de la « pépinière d’entreprises », des stades et autres équipements sportifs, des lotissements pavillonnaires, du campus, de l’hôpital. Bref, de réalisations qui échappent au maire.

Reconfigurer une ville productiviste en une cité digne de ce nom, composite, pédestre, économe en énergie, largement plantée  et soucieuse de son environnement nécessite des objectifs précis, des convictions, un soutien de la population et du temps, beaucoup de temps et des débats, des explications, des expositions, des controverses ! Une petite ville (moins de 10 000 habitants), paradoxalement, peut y arriver plus facilement qu’une ville de plus de 100 000 habitants.

Il convient de hiérarchiser les actions à entreprendre et de pratiquer la « juste mesure » pour assurer à toute la population un réel bien-être, comme dans le réseau des « villes lentes » ou des « villes en transition ». La superposition des instances de décisions (canton, communauté de communes, intercommunalité, métropolisation, département, région…) embrouille le municipalisme qu’il faudrait activer ! Les territorialités du politique ont changé avec la nouvelle géographie existentielle des citoyens, or l’on continue à voter là où l’on dort !

 

Et à Paris? Que peut-on attendre ou espérer de ces élections municipales, s'agissant notamment du logement, des projets de tours et de la Métropole du Grand Paris?

Paris devient une ville à consommer. J’hésite à dire qu’elle s’embourgeoise (y a-t-il encore des « bourgeois » ?), qu’elle se «gentrifie» ou se «bobo-ise» (deux anglicismes qui ne recouvrent pas vraiment ce qu’on peut observer), disons qu’elle s’homogénéise sociologiquement vers le haut d’une part et qu’elle se globalise d’autre part. Cette dernière tendance se mesure par l’augmentation du tourisme consumériste, qui remplace un tourisme artistique qui n’a plus les moyens –ceux de la bohème…– pour s’installer quelques mois dans la capitale et faire corps avec.

Anne Hidalgo et Nathalie Kosciusko-Morizet, les deux candidates ne diffèrent pas sur ce point, elles veulent que Paris soit en tête des villes mondiales destinées au tourisme. Du coup, elles font de la surenchère sur la data-city, les lieux de loisirs (aménagements des quais, nightclubs…), l’hôtellerie de luxe (reconversion de La Samaritaine et de la poste de la rue du Louvre…), les musées, les « événements »… et beaucoup moins pour l’ordinaire des Parisiens et des banlieusards qui se rendent quotidiennement dans la capitale.

« Il faut non plus réseauter mais rhizomer! »

La candidate « socialiste » n’a pas de bilan à mettre en avant, ni lorsqu’elle s’occupait du bureau des temps (alors qu’innover dans l’harmonisation des horaires, stimuler la chronotopie, encourager les temps urbains à la carte, repenser le plan lumière, etc., ont des conséquences intéressantes du point de vue environnemental, énergétique et en ce qui concerne la santé publique…), ni lorsqu’elle dirigeait l’urbanisme (son plaidoyer pour les gratte-ciel énergivores et anti-urbains date d’une époque révolue). La candidate de droite est bloquée par les thèmes chers à son électorat : la sécurité, la propreté, la fiscalité, l’entre-soi, etc.

Aucune n’est assez audacieuse pour engager le tournant nécessaire à une telle ville afin qu’elle chante la diversité sociologique et culturelle, qu’elle palpite aux rythmes saisonniers du vivant, qu’elle accueille mille et une surprises venues de ses banlieues trop longtemps méprisées, qu'elle déclenche des réformes municipalistes et développe la démocratie participative ! Au lieu de cela, la technocratie et les lobbies (du BTP, des transports sur rail, des promoteurs de centres commerciaux, des centres de loisirs et de tourisme organisé, etc.) cherchent à enfermer les énergies créatrices qui se manifestent ici et là en un Grand Paris d’une autre époque. Il faut non plus réseauter mais rhizomer !

 

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