Catherine Meurisse, l’insoutenable légèreté du trait
La dessinatrice Catherine Meurisse a participé à l’aventure de Charlie Hebdo et publie chaque mois dans notre magazine la bande dessinée « Humaine, trop humaine ». Alors qu’une exposition lui est consacrée au Centre Georges-Pompidou, à Paris, elle revient sur sa trajectoire et ses sources d’inspiration en quelques dessins.

Dessin tiré de La Légèreté © Catherine Meurisse, Dargaud, 2016.
Je suis une sentimentale, pas un soldat
« Après les attentats contre Charlie Hebdo, après cette catastrophe, j’ai senti que je devais quitter le journal. J’avais perdu la mémoire, les mots, jusqu’à la possibilité de dessiner. Pendant deux ans, je n’ai pas réussi à lire ni à me concentrer sur aucune tâche. Dans cet état de choc, je ne me voyais pas endosser pour toujours le rôle de soldat du dessin de presse, de militante de la liberté d’expression. Bien évidemment, lors de mes dix années de travail à Charlie Hebdo, au contact de personnalités comme Cabu ou Charb, j’ai développé une forme de conscience politique. Cabu ou Wolinski étaient des mines de culture historique et militante, ils m’ont tous beaucoup appris. Mais je ne me voyais pas m’engager à vie pour une cause. C’est la voie qu’a choisie Riss, il ne cédera jamais et il est d’un courage exemplaire. Mais moi, comme Luz, j’ai pris la tangente et suis revenue à mes premières amours, c’est-à-dire au goût pour la nature, la marche, l’art – la recherche de l’apesanteur et de la beauté. Cette planche issue de La Légèreté me représente en train d’escalader la dune du Pilat, où m’avaient emmenée des amis qui s’inquiétaient de ma prostration post-traumatique et voulaient me faire voir l’océan pour me changer les idées. Je monte seule sur la dune. C’est un moment presque transcendant. Les couleurs rayonnaient autour de moi. Pendant les mois qui ont suivi les attentats, je n’ai jamais cessé de marcher. Non seulement parce que j’étais terrifiée, mais parce que je recherchais le mouvement et le chemin qui me ramèneraient vers la vie.
À cette époque aussi, je suis tombée sur une phrase de Nietzsche, que j’ai placée en exergue de La Légèreté : “Nous avons l’art pour ne pas mourir de la vérité.” Je n’y ai pas perçu une thèse philosophique complète mais des mots qui m’ont plu : “nous”, “ne pas mourir”. Pour moi, à l’époque, la ‘‘vérité” se confondait avec la “réalité”, et le seul réel que j’étais capable de considérer, c’étaient les tueurs et la mort de mes camarades de Charlie. Alors, j’ai suivi cette intuition : quand le réel nous blesse, l’art peut nous sauver. Je comprends que certains puissent trouver cette attitude trop détachée, comme s’il y avait une sorte de philistinisme à aller chercher du réconfort sur les bords de mer, devant des Caravage ou au forum de Rome, comme je l’ai fait, alors que le monde va si mal, qu’il est à feu et à sang. Et cependant, je vois la circulation des œuvres d’art entre les êtres humains comme un moyen de créer une chaîne de solidarité, un esprit partagé qui ne soit pas belliqueux. »
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