Avant qu’il ne soit trop tard
Notre maison brûle, et nous accueillons cette nouvelle avec une relative indifférence. Plutôt que d’en appeler à la raison, il vaudrait peut-être mieux mobiliser des récits propres à nous faire dresser les cheveux sur la tête.
Mon père était un grand voyageur. Lui qui avait passé quelques hivers sur les hauts plateaux du Tibet regrettait, à la fin de sa vie, de n’avoir jamais vu le fleuve Amazone. Il me disait souvent qu’il fallait faire certains voyages avant qu’il ne soit trop tard. Dans son esprit, cette mise en garde s’appliquait au voyageur. Il fallait partir avant d’être trop vieux, d’être malade, de ne plus pouvoir.
Trop tard, pour moi, a pris un tout autre sens. C’est la forêt qui pourrait brûler avant que j’aie le temps de la voir. La forêt amazonienne pourrait disparaître avant moi. Le deuxième volet du rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) publié en février dernier se résume en une phrase : la maison brûle. Même si nous parvenons à limiter l’augmentation des températures, les sécheresses, les mégafeux vont dévaster une partie de notre environnement. Au début des années 2000, le philosophe Glenn Albrecht a forgé un mot pour exprimer le sentiment suffocant de voir son environnement promis à la disparition : la solastalgie. Soit la nostalgie par anticipation – savoir que notre territoire se dérobe sous nos pieds, qu’il sera submergé, emporté, consumé, ne plus reconnaître les paysages où nous avons grandi. Malheureusement, les mots trop jeunes et les rapports scientifiques ont beau en appeler à notre raison, il semble leur manquer le pouvoir occulte des légendes – celui de nous dresser les cheveux sur la tête et de mettre fin à la sidération.
Et ce mot, c’est « solastalgie ». Avec ce concept – et de nombreux autres –, le philosophe transdisciplinaire australien Glenn…
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